jeudi 5 septembre 2013

Shama et Coucal

A Sukau les journées commencent par un levé de soleil.

Aux premières lueurs du jour les fleurs innombrables s’étirent en baillant, elles se secouent ensuite comme des petits chiens et alors seulement, une à une, se déroulent lentement et sans pudeur étalent leur voluptueux atours.

Il n’en faut pas plus aux oiseaux pour sortir de leur cachette. Les nocturnes, la patte un peu trainante las d’une nuit de labeur croisent les diurnes surexcités. Il est 6 heure, place au chant territorial ! Ca cliquette, ça sifflote, ça croasse à qui mieux-mieux mais le concert ne serait pas complet si, après quelques toussotements caverneux, notre muezzine n’entamait à son tour et à pleins poumons les prières du matin.

C’est l’heure que choisi Tikka pour se lever. Seule, elle arpente silencieusement les immenses couloirs de notre luxueuse villa. Inutile de lui parler. Le nez collé à la moustiquaire, pour une heure, elle est toute entière à l’observation et à l’enregistrement méthodique des mœurs des « à plumes » et plus particulièrement de son protégé, le white-Crown Shama.

Mais que vaut à ce maudit volatile la religieuse dévotion que ma femme me refuse encore? Le White-Crown Shama n’a pourtant rien de très particulier aux premiers abords. C’est une grosse pie, avec, à son avantage, des reflets bleutés sur le dos, un beau ventre abricot et bien sûr une petite couronne blanche sur le sommet du crâne. Tout de même cela peut-il expliquer tant de ferveur ? Comment trouver plus d’attraits à un Shama à plumes qu’à votre serviteur à poils ?

Vous me le direz quand vous viendrez nous rendre visite…

A propos d’oiseau… J’ai appris une nouvelle recette à la portée de tous, vraiment originale et parfaite pour surprendre son monde. C’est une spécialité Iban, une tribu de Sarawak. On m’a assuré que cette pratique gastronomique n’avait plus cours chez nous, comprenez sur les rives du kinabatangan, et c’est bien dommage car l’authentique magie se fait trop rare de nos jours.

-       Comptez un couple de Grand Coucal pour 4 personnes. Choisissez les à l’époque de la ponte car c’est des petits que nous allons nous servir.

c'est ça un Great Coucal - pas commode.

-       Une semaine après l’éclosion rendez-vous auprès du nid. Attention : le Grand Coucal peut être agressif, assurez-vous toujours que les parents ne sont pas à proximité avant de tenter quoi que ce soit.

-       Prenez délicatement des oisillons dans le creux de votre paume en laissant dépasser les pattes entre vos doigts. Serrez les dents et de votre main laissée libre cassez la patte droite des oisillons chacun à leur tour. Replacez les dans le nid.

A leur retour, les parents Coucal (on ne dit pas Coucaux), trouvant leur progéniture dans le triste état dans lequel vous les avez mis, vont derechef et à tire d’aile s’en allé collecter dans la forêt des herbes médicinales. Et c’est là que la magie opère. Le Grand Coucal connaît les herbes secrètes. Il les connaît si bien que ses oisillons vont se remettrent et guérirent en moins de temps qu’il ne me vaut pour écrire cette histoire! Magique je vous dis.

-       Revenez après 2 semaines.

-       Saisissez vous des oisillons en suivant la même méthode ci-dessus décrite et brisez la patte gauche. Ne prêter aucune attention aux cris de détresse.

Et c’est reparti. Les parents s’en retournent chercher des herbes magiques et c’est ainsi qu’on obtient des oisillons gavés à la l’herbe magique.

-       Patientez encore 2 semaines et collectez les oisillons.

-       Engraissez les pendant une semaine à base de riz gluant.

-       Ecorchez et immerger définitivement dans une grande bouteille d’alcool de riz.

-       Laissez infuser quelques années. C’est prêt !

Vous avez une délicieuse potion médicinale qui accompagne par ailleurs les viandes rouges les plus variées du travers de porc-épic à la queue Monitor Lézard.

Un peu de magie pour Noël ?

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